mercredi 28 mai 2014

Chuck Testé - Gran Theft Auto 5


Le souvenir des heures passées à rater des missions dans GTA Vice City m'a aujourd'hui rattrapé dans mon métier.
Les enseignants, par ignorance et par déni, décrient souvent le jeu vidéo, responsable de bien des maux de notre société. En septembre dernier, un nouveau pavé est venu éclater la vitre qui sépare l'école et le foyer.
Après de longues années d'attente, GTA 5 est arrivé dans le salon de millions d'appartements français. Noté PEGI 18 (interdit au moins de 18 ans) cela n'a pas empêché les parents de l'offrir à Noel aux grands frères, parce qu'il est LE jeu à la mode. Lorsque les grands frères lâchent la manette, ce sont les petits frères qui la chopent et se mettent à parcourir Los Santos tout seuls comme des grands.

C'est alors que GTA 5 arrive à l'école…
Il faut impérativement faire prendre conscience aux enseignants que si l'écran constitue 80% de l'occupation de temps libre de l'enfant de ZEP, à partir de 8 ans, la plus grande part de ce temps est consacré aux jeux vidéos.
Le problème est là. L'esprit de l'enfant est obnubilé par le jeu vidéo. En Cm2, ils discutent de jeux vidéos en se déplaçant, à la récréation, dans le bus et parfois même en classe. J'estime que certains élèves sont meilleurs que moi à GTA et qu'ils connaissent mieux la map de San Andreas que comment calculer un périmètre.
C'est une réalité, les compétences nécessaires à l'apprentissage sont mobilisées par quelque chose de passif et de non créatif. Si le jeu vidéo ne stimulera pas la création imaginaire, il fait appel à un système de réflexion logique qui est extrêmement poussé pour certains opus. 
GTA 5, Call of Duty, demandent une coordination logique afin de développer des stratégies, de mobiliser des réflexes visuels et gestuels.

Regardons maintenant le support que l'on nous impose.
Je voulais attendre la sortie sur PC pour acheter GTA 5, pour pouvoir y jouer en le moddant. J'ai fini par craquer, je l'ai acheté sur PS3. Mon expérience sur GTA vice city, San Andreas et GTA 4 et dans le jeu vidéo en général me permet de juger ce nouvel opus avec ma vision de joueur mais aussi d'enseignant.
Le jeu nous propose comme d'habitude un monde ouvert, une île où tout est possible, tout est interactif. L'aventure principale nous fait interpréter 3 personnages de physique, de milieu et de caractères différents. L'activité majeure de GTA consiste à conduire un véhicule afin d'effectuer une mission. Le succès de ce jeu vient de la liberté d'action qui nous est donnée. Même si certaines missions nous obligent à commettre des actes illégaux, on peut finir le jeu sans tuer un innocent et semer le chaos.
L'image d'Epinal communiquée autour de GTA: "c'est un jeu où on tue des putes". Oui c'est possible, ça peut arriver. Seulement, ce jeu est destiné à un public adulte, public qui sait faire la différence entre jeu et réalité. Ce n'est pas le jeu qui va influer sur le comportement de quelqu'un, mais l'inverse. Je ne me lancerai pas aujourd'hui dans une explication sur la violence dans le jeu vidéo. Mais il est évident que GTA a un effet purement cathartique sur le joueur.
Il peut enfin accéder à l'inatténiable. On peut conduire des voitures de sport, courir pendant des heures, tuer sans souffrir des conséquences….

Un enfant ne pose pas les mains sur GTA par hasard. Comment cela a-t-il pu se produire ? Dans quel milieu cette permission est elle possible ?
Dans des conditions idéales ce ne serait pas possible, le battage médiatique et la note PEGI alerteraient les parents.
Mais qu'en est il de nos élèves ??
C'est ici que les enseignants doivent être attentifs. Les élèves qui jouent à GTA sont des élèves dont le milieu familial est désastreux. Et bien sur, on le sait déjà.
Il s'agirait désormais de retourner le problème. Nos élèves jouent, leur attention et leur intérêt sont fixés sur le jeu (vidéo). Il est à nous de faire avec, d'utiliser cet intérêt pour le rediriger vers l'apprentissage. Il me semble inévitable d'intégrer l'écran et le jeu vidéo en particulier dans le socle commun. Qu'il ne soit plus un malheur que l'on invoque en cas d'échec, mais qu'il devienne un outil, pour ne pas dire un moteur.
On ne peut plus faire comme si cela n'était qu'une affaire de loisir extérieur à l'école. Un enfant qui est capable de réaliser un braquage sur sa Playstation doit pouvoir calculer l'aire d'un triangle. C'est juste que c'est moins amusant.

Allez, demain je vous parle de GTA 5.